La Tunisie Economique N° 11 Février 1977

La Tunisie Economique N° 11 Février 1977

      Hommes et techniques

M. GAMHA, un self made man :
  " Ce ne sont guère les diplômes qui font un homme "
         
Comment devenir entrepreneur.
comment créer une entreprise avec des moyens de bord. Plusieurs de nos concitoyens ont cet esprit d'entreprendre. Certains d'entre 'eux ont réussi, d'autres en revanche en rêvent    encore .
Cependant pour réussir, il faut avoir une volonté de fer et savoir comment contourner les obstacles. Car, du projet à sa réalisation le chemin est jalonné d'énormes obstacles.
Dans cette nouvelle rubrique 'Hommes et entreprises" nous vous proposons de vous exposer des expériences vécues par certains Tunisiens qui ont cet esprit d'entreprendre et qui ont réussi.

 
    47 années dans un physique très jeune  les cheveux noirs tombants sur la nuque. Elégamment  vétu .Un bel homme. C'est M. gamha. un ancien Ministre, voyant un jour les produits Chauvec exposés a voulu voir "Monsieur Chauvec", collant le nom de l'entreprise à son créateur, croyant ce dernier étranger. M Chauvec nétait en fait que monsieur Gamha, un Tunisien, comme il aime à le souligner voulant dire en filigrane que nous aussi Tunisiens sommes capable de créer... Il en est la preuve.

Un sourire presque permanent, le verbe facile, le geste aussi, il remonte des années en arrière savourant le souvenir de ses échecs, de sa persévérance et enfin de sa réussite . Il est en effet beau de revoir le filme de sa vie, et pour Mr GAMHA sa vie c'est aussi celle de son entreprise : " Chauvec c'est une partie de moi-même, c'est quelque chose que j'ai enfanté"...

Mai 1964,  CHAUVEC voit le jour. Au début c'était une boutique où on peut trouver quelqu'un qui peut installer un chauffage. C'était ce qu'on appelle aujourd'hui purement et simplement une boutique de plombier. C'est le début de M. GAMHA dans le domaine. Etait-il qualifié, avait-il fait auparavant des études dans ce sens?

Là une autre affaire, une longue histoire ... Il l'a raconte avec le sourire de celui qui se rappelle  ses débuts gauches mais générateurs d'une vie et d'une expérience dont les fruits sont aujourd'hui réels, palpables...  Un défi remporté.!     

  Naceur Eddine GAMHA est... un Zeitounien, " j'étais instituteur unilingue d'arabe " . Il sourit. Son seul diplôme : le Tahsil.  4 années à enseigner dans les écoles primaires à Jerba, Kairouan.. 
"ça ne me plaisait pas" dit-il et il se lançe dans le fonctionorat. Ministère des Finances, Office des Céréales où il était agent de la catégorie B. Un mauvais départ quelques rectifications mais rien le satisfait, lui et sa famille déjà nombreuse .
" En 1962, dit-il, " j'ai décidé  de tout refaire " . Le défi est lancé. Un défi de taille, car " quand on a une famille nombreuse  il faut être exagérément ambitieux pour laisser tomber une situation... stable". Ajoute-il pensif.
 

  " Personne ne voulait croire "

Quatorze mois donc , après avoir quitter l'Administration, M GAMHA  songe à monter une entreprise.
Le comment, l'avec quoi restent à solutionner.
" A cette époque, dit-il, regardant dans le vide comme pour relater ses difficultés avec leurs détails les plus infimes,   un grand problème avait surgit : l'argent... un problème de taille. "  M. Naceur Eddine a beau étalé son projet devant les gens, il a beau parlé de sa compétence ... personne ne voulait le croire... " Personne ne voulait engager son argent dans l' incertitude. Mes amis, dit-il essayaient de m'aider mais avec des sommes minimes" .
  En dépit de  tout, en 1964 une société à responsabilité limitée est née. Capital : Deux mille dinars. C'était une petite boutique du côté du port, à Sousse. L'ancien Instituteur a trouvé un de ses anciens élèves pour l'aider à faire démarrer l'entreprise. Première réalisation un chantier de douches populaires à Béja. En 1966 M. GAMHA a entrepris l'installation de chauffage dans l'un des hôtels de Sousse.
" ça  marchait, plutôt ça boitait.. " dit-il  " mais j'ai voulu avancer encore plus.. " souligne-t-il . Le défi demeure.
  En effet dans son premier stade, l'entreprise ne faisait que l'installation des appareils de chauffage, de ventilation et de conditionnement. Dans un deuxième temps M GAMHA  voulait passer à la phase fabrication. "
Pour ce faire dit-il , j'ai démonté un brûleur pour voir son mécanisme et déceler toutes ses caractéristiques techniques de construction. Et à partir des données existantes, j'ai essayé de faire des permutations pour arriver à un produit autre et meilleur. J'ai ainsi étudié une grande gamme  en changeant la carcasse, en augmentant la puissance ... ** "


 

Fabriquer sans agrément .. (suite )

  Aujourd'hui l'entreprise CHAUVEC s'étend sur 4400 m²  sur la route de Zaouiet et celle de Msaken , à 2 km de la ville de Sousse. A l'entrée, à gauche , c'est l' administration , en face ce sont les les ateliers de stockage. Chauvec fait vivre 4 employés et 28 ouvriers dont son ancien élève, qui a assisté à la naissance de l'entreprise. M GAMHA est le Président Directeur Général de la Société, certes, mais un PDG  qui est toujours à aider ses ouvriers, à les recycler, à les informer en personne." Je ne me suis pas reposé depuis 1968 " a-t-il dit non en se lamentant, mais dans un ton  tout satisfaction ; car quand M GAMHA s'ennuie , il se met à travailler. Et ce le secret de sa réussite. Celui de la réussite de son entreprise aussi.

Avant de terminer voici quelques chiffres: pou 1977, CHAUVEC projette la fabrication de 400 chaudières à mazout et à gaz, 450 brûleurs à mazout, 50 brûleurs à gaz, 100 réservoirs de différentes capacités, 3000 de tubes à ailettes, le tout au prix de 330 mille dinars.

  Cela s'appelle avoir remporter le défi !

" Le chauffage qui ne marche pas"


" La vie de fonctionnaire à l'Office des Céréales à Tunis m'a servi à quelques chose", affirme M.GAMHA. C'est un chauffage qui ne marche pas qui fait qu'il a pensé s'intéresser à la gente des chauffages.
C'est à partir de ce moment qu'il a essayé de mettre en marche que M. GAMHA a rectifié son tir dans la vie. Il est surprenant de voir le destin d'un homme, le destin de M. CHAUVEC ( l'homme et l'entreprise ) se construire sur une petite circonstance. Voulant réparer un chauffage , il se mit à en fabriquer. Il faut dire également  qu'avec ce hasard M GAMHA avait un goût pour la technique. "
Je voulais tout toucher pour savoir, je voulais toujours déchiffrer et comprendre les mécanismes... "// Ne dit-on pas qu'aimer c'est réussir ? L'amour de M GAMHA pour la technique a lui-aussi , façonné sa vie de petit instituteur qui a échoué dans la bureaucratie.

Rectifier le tir


En 1962 M. GAMHA a démissionné de l'Office des Céréales... " j'ai planqué à jamais la monotonie de l'administration dont je suis sorti indemne. " , me dit-il d'un air triomphal.

  Après ma démission j'étais parti en France  pour m'inscrire à l'Institut Technique Professionnel à Paris, après quoi je suis revenu en Tunisie pour me cloîtrer chez moi et suivre des cours par correspondance pendant 14 mois."  "La famille, dit-il c'est mon père qui s'en était chargé pendant mon inactivité". A l' issue des cours théoriques que je me suis efforcé d'assimiler, je me suis mi à cogiter sur l'entreprise. L'examen ? Je n'ai pas été le passé.
Là se dégage, en effet la nature de M. GAMHA. Pour lui vouloir faire, vouloir réussir ne sont pas  fonction de diplômes.
"  ce ne sont guère les diplômes qui font un homme" .. Comme il a le plaisir de répéter.
Il n'est pas à la portée de tout un chacun de changer complètement d'option dans la vie. Il est également difficile pour un père de 6 enfants de se lancer dans une aventure avec pour hypothèse l'incertitude.
       

  

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En 1967 " ça a marché " en dépit de toutes les difficultés possible et imaginables, difficultés inhérentes aux conditions de travail, au manque, sinon aux prix élevés des matériaux etc...
"  Pour ce qui des chaudières c'est un autre genre de travail," explique M GAMHA, car il faut tout fabriquer ici même  "." J'ai fabriqué un prototype que j'ai inventé moi-même"   ajoute-t-il toujours défiant. " Mais toujours les difficultés.. "" En effet à ce stade, l'agrément pour l'exploitation de son invention ne lui a pas été octroyé. "" On me demandait de fabriquer des chaudières étrangères sous licence ! inadmissible dit-il toujours souriant, enchaînant avec un je n'ai pas abandonné " .


      Fabriquer sans licence

" Je fabriquerai sans agrément, et si vous constatez une anomalie dans mon produit, retirez-moi mon brevet et arrêtez-moi " telle était sa réponse.
Ce qu'il fit ! Et ce n'est qu'en 1970 que l'agrément lui a été accordé. Mais il fût toujours bousculé par l'importation, " état, au fait qui dure jusqu'à nos jours". " En effet, estime M GAMHA, les produits GAMHA ne sont guère protégés contre les produits importés, et le snobisme du Tunisien qui cherche ce qui fabriqué ailleurs aidant, cela cause des difficultés à l'entreprise... " et des ennemis à M GAMHA.

     
  Tél: 22 665106

 
naceur.gamha@gnet.tn

chauvec@chauvec.com

g.nacereddine @planet.tn

chauvec.gamha@gnet.tn

www.chauvec.com

www.AISST.org.tn